Intégrer la dimension numérique dans vos statuts
L’un des volets fondamentaux de l’actualisation des statuts en cas de transformation digitale est l’intégration explicite de clauses relatives au numérique. Vous pouvez, bien sûr, vous appuyer sur un professionnel du droit pour le formuler correctement. Toutefois, il est essentiel de bien cerner les points clés avant de procéder à cette révision. Je vous liste ci-dessous quelques éléments à mettre en avant.
Clause sur la propriété intellectuelle
Avec la montée des actifs numériques, la question de la propriété intellectuelle devient centrale pour beaucoup d’entreprises. Vos statuts peuvent donc préciser qui détient les droits sur les logiciels développés en interne, sur les bases de données de clients ou sur les marques et brevets déposés en lien avec vos activités digitales. Dans certaines configurations, il est pertinent de clarifier la répartition de la propriété intellectuelle entre la société et les associés, notamment si vous travaillez avec un partenaire extérieur ou un prestataire qui co-développe une solution numérique. De même, il peut être utile de prévoir une procédure de cession automatique de droits en cas de départ d’un associé clé, afin d’éviter les conflits ultérieurs.
Par ailleurs, si votre business model inclut la création de contenus originaux (articles, vidéos, formations en ligne), vous pouvez ajouter une clause reflétant la notion de droits d’auteur pour les œuvres créées au sein de l’entreprise. Cette précaution vous permettra d’éviter diffusions abusives, reventes illégales ou revendications de tiers. Lorsqu’un investisseur s’intéresse à votre société, il portera d’ailleurs une attention particulière à la bonne protection de ces actifs numériques. Un fort actif immatériel (brevet, base de données stratégique, algorithme unique) peut représenter une valeur considérable dans votre bilan.
Protection des données et RGPD
La conformité au RGPD (Règlement général sur la protection des données) est devenue incontournable pour toutes les entreprises qui collectent ou traitent des informations personnelles. Même s’il n’est pas obligatoire d’insérer toutes les dispositions du RGPD dans vos statuts, il est judicieux de préciser que votre entreprise s’engage à respecter la législation en vigueur en matière de protection des données. Vous pouvez, par exemple, mentionner la nomination éventuelle d’un DPO si votre activité l’exige, ou encore les mécanismes de gouvernance internes prévus pour assurer la confidentialité. Inclure une clause spécifique montre que vous prenez ces problématiques au sérieux, rassure vos partenaires et clarifie la responsabilité de chacune des parties prenantes.
Au-delà de la question du RGPD, la transformation digitale soulève souvent d’autres problématiques liées à la sécurité des systèmes et à la gestion des consentements utilisateurs. Les statuts peuvent ainsi mettre en avant la volonté de mettre en place les moyens techniques et humains nécessaires à la protection des informations stratégiques. Dans la pratique, cette clause sert surtout à renforcer votre argumentaire lors d’un contrôle ou vis-à-vis d’investisseurs, mais elle peut aussi vous couvrir en cas de litige interne : elle rappelle que la sécurisation et le respect des obligations légales sont des priorités de gouvernance, et non de simples options facultatives.
Organisation interne et gouvernance
La gouvernance d’une entreprise en pleine transformation digitale réclame souvent une répartition précise des pouvoirs et des compétences. Ainsi, vous pouvez inclure des dispositions définissant de nouveaux postes ou comités : par exemple, un « comité innovation » ou un « comité digital », chargé de piloter la stratégie de transformation. Certains dirigeants optent pour une direction bicéphale entre un président en charge de la stratégie générale et un directeur opérationnel responsable des chantiers numériques. Dans ce cas, veillez à ce que les statuts précisent clairement leurs rôles respectifs et leurs champs de compétence.
Il est également judicieux de traiter la question des droits de vote spécifiques aux décisions critiques en matière de transformation digitale (allocations budgétaires technologiques, signatures de partenariats stratégiques, embauche de profils IT, etc.). Si vous introduisez des clauses de majorité renforcée pour ces décisions, vous sécurisez le process en empêchant toute prise de décision unilatérale ou non concertée. Pour autant, vous devez aussi veiller à conserver une certaine flexibilité. La transformation numérique nécessite une capacité de réaction rapide. Attention aux statuts trop rigides qui pourraient ralentir les décisions opérationnelles vitales pour la compétitivité de l’entreprise.